Interview de Raphaël Gallardo – Natixis Asset Management

Photo Raphaël Gallardo

Experts en patrimoine est heureux d’interviewer un des économistes de marché les plus en vue à Paris, Raphaël Gallardo, stratégiste allocataire chez Natixis Asset Management.

Alors que le niveau de volatilité des marchés s’est significativement accru depuis avril et que la situation en Grèce occupera une bonne partie de l’été, il nous est apparu plus que jamais opportun de partager avec vous le point d’un expert en économie et en stratégie de marché, un de ceux dont nous lisons régulièrement la recherche et avec qui nous confrontons nos convictions dans nos allocations d’actifs.

Experts en patrimoine : Raphaël, tout d’abord merci de nous accorder cet entretien. Pourriez-vous partager avec nous votre vision des enjeux du « problème grec » et son impact sur le projet européen, la croissance, et enfin au niveau de l’Euro ?

Raphaël Gallardo : La situation est hélas critique pour la Grèce, qui est insolvable en tant que nation tant qu’elle reste dans la zone euro. Le problème ne sera en rien résolu par une annulation ou un reprofilage de la dette publique. Le problème est l’incapacité du pays à retourner au plein emploi sans générer à nouveau un déficit courant abyssal. Pour redevenir solvable, la Grèce doit réduire massivement ses coûts salariaux. Le faire à l’intérieur de la zone euro implique un chômage socialement inacceptable, comme l’ont démontré les dernières élections. Une dépréciation monétaire permet de réaliser l’ajustement en jouant sur les prix relatifs intérieurs, ce qui est beaucoup plus rapide et moins coûteux en termes de chômage. Malheureusement, cela impliquerait de sortir de la zone euro, et cette opération entraîne des coûts très élevés. Le FMI a fait le bon diagnostic dès le début, mais pour des raisons politiques, l’Allemagne ne peut pas admettre l’idée que sa stratégie d’austérité et déflation salariale, qu’elle a imposée au reste de la zone comme seul mode d’ajustement, est un échec. D’où l’impasse politique actuelle, qui risque de perdurer encore des mois. L’impact dépasse donc largement l’enjeu de la contagion économique, qui est, en soi, limité. Il s’agit de la valeur d’exemple du cas grec, qui risque de détruire le consensus qu’Angela Merkel avait construit sur les règles de solidarité et conditionnalité nécessaires à la survie de la zone euro.

Experts en patrimoine : Quelles en sont les conséquences possibles sur les marchés obligataires et actions, européens et non européens ?

RG : Pour l’instant, l’impact est limité car le consensus s’accroche à un scénario de ‘sortie par le haut’ de cette crise, alors que la rupture politique entre Tsipras et Merkel est totale. Il semble difficile que Merkel discute en confiance avec un Tsipras forcé de revenir à la table des négociations par l’asphyxie de l’économie grecque suite au contrôle des changes. L’incertitude devrait donc perdurer plusieurs mois encore. Les actions européennes ont accusé le coup, mais sans grande discrimination sectorielle – il semble que ce soit des dégagements surtout d’investisseurs étrangers qui ont pris des profits après un parcours impressionnant depuis le début de l’année. L’euro a peu bougé en conséquence, car beaucoup d’investisseurs étrangers avaient couvert leurs positions de change en actions européennes. Au-delà de la Grèce, on a plutôt le sentiment d’une remontée générale de l’aversion au risque sur tous les marchés actions, liée non seulement aux événements européens, mais aussi à l’approche des hausses de taux de la Fed et au malaise de l’économie chinoise, qui plus est affublée d’une bulle sur le marché actions (Shanghai, Shenzen).
Sur les marchés obligataires, on a vu les spreads périphériques s’écarter brutalement après l’annonce du référendum, mais le marché a vite repris ses esprits : conscients des armes anti-contagion dont dispose la zone euro, notamment le QE en cours de la BCE et l’option d’utiliser les OMT (légalisée par la Cour Justice Européenne il y a quelques jours), les investisseurs anticipent que la contagion via les spreads de taux sera très rapidement endiguée. Par contre, les obligations d’entreprise ont souffert en sympathie avec les actions, mouvement qui a été amplifié par le manque de liquidité chronique sur certains segments.

Experts en patrimoine : Comment voyez-vous la parité EUR/USD évoluer ? Une exposition accrue à la devise américaine fait-elle du sens ?

RG : A court terme (1-2 mois), nous sommes neutres : la parité devrait rester dans une fourchette étroite 1.10-1.15. C’est également le message passé par le dernier G7 où il a été acté de plafonner la hausse du dollar. Une sortie de la Grèce de la zone euro pourrait entraîner, dans la panique, un décrochage de la monnaie unique, mais nous pensons que ce mouvement serait vite corrigé, le marché se convaincant que, débarrassé de son maillon faible, le système serait au final plus solide. D’ici la fin de l’été, l’euro pourrait commencer à s’affaiblir de nouveau en raison de l’approche des premières hausses de taux de la Fed.

Experts en patrimoine : Monsieur Gallardo, nous vous remercions d’avoir partagé votre vision de la situation économique avec nous.


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Achevé de rédiger le lundi 06 juin 2015

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