Par un arrêt du 11/11/2023 (no 21-12732), la Cour de cassation a tranché la question de la taxation (au dénouement) d’un contrat d’assurance-vie souscrit avec des fonds provenant d’un quasi-usufruit et ayant pour bénéficiaire l’héritier réservataire du souscripteur/assuré.
Le placement de sommes d’argent faisant l’objet d’un quasi-usufruit
Le Défrénois du 26/10/2023 revient sur cette décision intéressante touchant une situation bien plus fréquente que l’intitulé ne le laisse entendre. En effet, le souscripteur est ici simplement un conjoint survivant, de plus de 70 ans, quasi-usufruitier d’une somme d’argent, qui aurait pu cocher au moment de la souscription la clause par défaut : « mon conjoint, à défaut mes enfants… ».
Ici, l’épouse survivante (la conjointe) hérite de l’usufruit d’un portefeuille d’obligations et leur fille, héritière réservataire, de la nue-propriété des titres, titres déposés, en toute légalité sur un compte-titres avec mention du démembrement. À l’échéance des titres, le nominal des obligations est crédité sur le compte titres et la question du placement de la somme désormais inscrite se pose.
Proposition de rectification (et double imposition ?)
Cette somme est alors investie dans un contrat d’assurance-vie souscrit par la seule épouse survivante. Au décès de l’assurée, sa fille dépose la déclaration de succession sans référence au contrat dans l’actif successoral et se voit notifiée deux ans après d’une proposition de rectification de l’administration fiscale portant sur les droits de mutation de sa mère. La fille conteste.
La Cour d’appel annule la rectification, indique que la somme versée sur le contrat d’assurance-vie ne peut être imposée au titre de l’article 757 B du CGI (qui s’applique pour les sommes versées sur un contrat par un assuré de plus de 70 ans) et qu’il appartient à l’administration fiscale de recalculer l’impôt éventuellement dû au titre de la succession, mais que l’imposition de la prime versée sur le contrat – après l’avoir déjà imposée au titre de la succession – revient à pratiquer une double imposition. L’administration fiscale se pourvoie en cassation.
Par son arrêt, la Cour de cassation donne raison à l’administration fiscale et décide que :
- les sommes (ou rentes ou valeurs) quelconques dues directement (ou indirectement) par un assureur, à raison du décès de l’assuré, donnent ouverture aux droits de mutation par décès suivant le degré de parenté existant entre le(s) bénéficiaire(s) et l’assuré à concurrence de la fraction des primes versées après l’âge de 70 ans qui excède 30 500 € (cad l’abattement prévu par l’article CGI, art. 757 B tous bénéficiaires confondus) ;
- l’héritière (la fille) est bien imposable aux droits de mutation par décès sur la somme versée par l’assuré (excédent les 30 500 €), en sa qualité de bénéficiaire du contrat (fonds versés par l’assurée – sa mère – sous forme de primes après ses 70 ans) ;
- mais surtout qu’il n’en découle aucune double imposition dès lors que, la fille détient une créance de restitution à faire valoir sur la succession de sa mère, créance égale au montant de la prime versée, laquelle créance vient se déduire de l’assiette de la base imposable des droits de mutation par décès.
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